Crédit Photo: The North Face
Crédit Photo: Tero Repo
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Interview de Xavier De Le Rue
1- Montagne en Scène: Salut Xavier ! Raconte-nous d’où tu viens et comment tu t’es mis au snowboard et au freeride ?
Xavier :
J’ai grandi à Saint Lary dans les Pyrénnées. J’ai commencé le ski quand j’avais 3 ans. J’ai fait beaucoup de ski club et puis à 13 ans, j’ai découvert le snowboard et ça m’a emballé.
On a créé le snowboard club à Saint-Lary qui était vraiment puissant, il y avait une ambiance de malade. J’ai vécu des années de folie, à faire des compétitions, sans grande prétention. Je suis rentré de plus en plus dans le système et ça m’a plu donc j’ai fini par en faire une carrière.
Le freeride, je m’y suis mis petit à petit. J’adorais la poudreuse depuis le début et pour moi être dans ces montagnes que je voyais au loin, ça a toujours été mon objectif à long terme donc j’ai un peu réalisé mon rêve !
2- MES: Chez les De Le Rue, vous êtes plusieurs à compter parmi les meilleurs mondiaux, quelle est votre recette magique ?!
Xavier :
Avant tout, je crois qu’on aime ce qu’on fait, c’est vraiment la base. On n’a pas peur de travailler. Et puis le fait qu’on soit plusieurs frères, ça a créé une certaine émulation et de fil en aiguille, en se regardant les uns les autres, on a réussi à progresser. On continue de s’influencer et de progresser par ce biais-là.
3- MES: Tu as parcouru le monde entier avec ton snowboard. Quels sont tes spots préférés et pourquoi ? Peux-tu nous décrire les différentes ambiances ?
Xavier :
Dans tout ce qui est freeride, il y a vraiment l’Alaska dont on parle depuis des années. C’est une neige vraiment hallucinante, hyper dense, qui colle vraiment aux pentes et qui fait des sortes de spines (traduction : des épaules). C’est vraiment le truc typique de l’Alaska et ça en fait un terrain de jeu extraordinaire parce qu’il y a beaucoup de neige, qu’elle est stable donc on arrive à rider des trucs super raides, qu’on ne pourrait pas faire chez nous. Donc c’est clairement un de mes spots de prédilection.
Après, il y a l’Antarctique qui m’a tapé dans l’œil et qui est maintenant je pense mon endroit favori. C’est l’endroit le plus spécial que j’ai trouvé de ma carrière parce qu’il y a des paysages à couper le souffle, complètement différents que tout ce qu’il y a partout sur la planète. Et puis après, il y a ce même phénomène de neige hyper dense et qui fait qu’on arrive à se retrouver dans des pentes à 60-70° sans trop de problème. On s’éclate à rider au-dessus de la mer donc j’ai des images exceptionnelles dans la tête depuis ce voyage.
4- MES: Quel est le meilleur souvenir de ta carrière ? Et le pire ?
Xavier :
Le pire, je peux assez facilement dire que c’était la grosse avalanche en 2008. J’ai fait presque 2km dans cette avalanche donc c’est un miracle que je sois encore en vie. C’était vraiment une grosse leçon. (NDLR: Découvrez cette avalanche monstrueuse ici)
Le meilleur souvenir, j’aurais tendance à dire que c’était il y a 2 ans quand je me suis mis à rider des faces Nord tout en glace. J’ai travaillé là-dessus pour essayer de descendre ces pentes en glace plutôt que de les faire en rappel. Il y a un couloir qui était dans les Aiguilles Dorées à Chamonix qui était un petit peu l’aboutissement de cette façon de rider et qui m’a vraiment ouvert énormément de portes dans ma façon de voir la montagne.
5- MES: Cela fait plusieurs années que tu fais à la fois de la compétition et de la production d’image. Qu’est-ce que t’apportent ces deux approches du snowboard ?
Xavier :
Ca m’apporte un équilibre. Ca fait plus de 15 ans que je suis professionnel et donc je pense que si j’avais fait que de la compétition, j’en aurai vraiment eu marre et j’aurai perdu l’inspiration. A travers le freeride, et les changements de compétition j’ai réussi à aller chercher des qualités nouvelles dans mon style de snowboard et aussi à mettre du piment dans ma carrière. C’est grâce à ça que j’aime encore ce que je fais.
6- MES: Pour la première fois, tu as une saison compliquée sur le FWT, qu’est-ce qui c’est passé ?
Xavier :
Dans la compétition, on a des hauts et des bas. J’ai fait un peu le tour des compétitions de freeride. Le Tour (FWT) a un peu évolué et je ne me retrouve pas forcément dans les faces qui sont proposées. J’aime énormément Verbier et cette grosse face qui correspond à mon style de ride, mais après les petites faces… Je sais qu’ils essayent de privilégier une approche différente du freeride mais moi ça me botte moins. Dans toutes les dernières compétitions, je n’ai pas terminé une fois en bas sur mes pieds donc c’est aussi un peu un manque d’envie. J’ai plus besoin de grands espaces que de compétition et de dossard au niveau freeride en tout cas.
7- MES: L’année prochaine, tu vas participer aux JO à Sotchi. Qu’est-ce que ça représente pour toi ? As-tu suivi une grosse préparation pour cela ?
Xavier :
Ca fait plusieurs mois que je me prépare bien pour ça. Je pense que je n’ai jamais eu autant envie de me préparer pour une compétition. C’est d’ailleurs la première fois que je fais un tel programme de préparation. Ca me plait énormément. Je suis vraiment dans une bonne dynamique, ça me change de programme. Là, j’ai un objectif nouveau jusqu’au mois de février et ça me fait du bien de penser à autre chose, de travailler sur mon snowboard. Je suis comme un gamin qui recommence quelque chose donc c’est top !
8- MES: Tu parles parfois de la peur. Est-ce que c’est quelque chose que tu recherches ? Est-ce que ça t’empêche parfois de faire des choses ? Est-ce que ça a changé depuis que tu es papa ?
Xavier :
La peur, c’est une drogue quelque part mais c’est aussi un thermomètre. C’est quelque chose qui est nécessaire, que je cultive et qui permet d’éviter de s’emballer en montagne et d’oublier qu’en 2 secondes si on n’est pas attentif, on peut y passer. La peur fait partie de ma vie, ce n’est pas tous les jours agréable mais j’essaye d’utiliser ses bons côtés. La peur ça peut paralyser ou inhiber mais ça peut aussi rendre plus concentré, et plus attentif donc moi j’essaye de cultiver ce côté-là.
Après le fait d’être papa, bon bah c’est… malheureusement je suis quand même habitué, la maman de notre fille c’est pareil, elle a toujours fait pas mal de montagne. On fait des trucs assez engagés, des trucs forts parce que c’est notre style de vie, parce qu’on a toujours vécu comme ça mais on essaye quand même d’être raisonnable.
9- MES: On est ravis de présenter ton nouveau film : Mission Antarctique lors des différentes dates de la Nuit de la Montagne. Qu’est-ce qui t’a redonné envie d’aller là-bas ?
Xavier :
Je suis allé là-bas un peu par hasard il y a quelques années. J’étais sur un gros bateau de croisière, en tant que touriste. Je suis allé là-bas pour découvrir sans vraiment penser que j’allais trouver quelque chose d’aussi bien que ce que j’ai trouvé. Et j’ai été complètement bluffé par l’endroit. C’était bien au-delà que tout ce que j’avais vu jusqu’alors et donc on a pu faire quelques pentes, on a pu commencer à toucher du doigt.
Quand je suis rentré chez moi, je ne pensais plus qu’à y retourner pour réaliser le trip parfait. Ca a pris quelques années pour mettre toutes les choses en place et là c’est le résultat. C’est vraiment un trip riche qui va bien au-delà de l’aspect du snowboard uniquement. Un voyage, une exploration géographique et personnelle. Un souvenir qui restera gravé dans ma tête jusqu’à la fin de mes jours.
11- MES: Tu dis que c’est le « rewarding trip of your entire career », quel sera donc ton futur projet ?
Xavier :
C’est marrant parce que là j’écrivais un texte sur l’Antarctique, sur mes pensées etc. C’est clair qu’avant de partir là-bas c’était pour moi l’apothéose de ce que j’avais fait. Mais maintenant ça y est j’ai de nouvelles idées (rires) et donc je suis reparti sur autre chose. Ce sera pour le mois de mai prochain. Pour l’instant, je garde ça dans ma poche mais vous pourrez profiter bientôt sans aucun souci !
MES: Merci Xavier! Rendez-vous le 5 novembre au Grand Rex.
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Crédit Photo: Tero Repo